La pluie d'Anoeta...
Ce n’est pas un match qui restera dans les annales, mais il aura réussi le double exploit de contenter tout le monde, bleus et verts mélangés.
Tout d’abord, à tout seigneur, tout honneur, il aura contenté Bayonne, le vainqueur de cette rencontre qui conforte sa place de 4ème et assoit un peu plus sa position de barragiste parmi les 6 premiers du Top 14, à quatre journées du terme de cette phase qualificative.
Ensuite, le résultat de ce match saura satisfaire les vaincus, de valeureux Palois, opiniâtres qui auront su à force d’abnégation aller chercher sur le gong, le petit point qui va bien à leurs ambitions du moment.
C’est un match qui n’aura jamais su trouver le débridage qui va bien à sa liberté de jeu, gardant en son for intérieur la crispation heurtée des joutes oubliables.
Avec un rythme qui n’a jamais trouvé sa bonne vitesse, trop souvent interrompu par des blessures, ou le pointillisme obséquieux d’un Julien Castaignéde, fidèle à sa légende de TMO scrupuleux confinant à un méticuleux au plus que parfait.
Ce match aura connu des envolées sporadiques, plus bleues que vertes, mais qui n’auront jamais eu la suite espérée ; celle qui fait se souvenir de courses folles ou de charges d’aurochs.
Rien de tout cela, juste un match qu’il fallait gagner d’un côté et ne pas perdre de l’autre.
Le sens du paradoxe tel que l’a décrit Kleber Haedens, ce fou de rugby, fan de Jean Dauger, dans son livre « Le paradoxe sur le roman ».
Bayonne n’a pas bien débuté, un en-avant évitable, une faute inutile et la pénaltouche, ce penalty du rugby, qui œuvre d’entrée avec une prise aérienne d’Hewat. Le groupé déroule vers la droite puis se désaxe sur sa gauche.
Dans ce zig-zag pénétrant, Bayonne est désuni, pas prêt et offre son essai à Lucas Rey pour son retour à ce niveau, sous les yeux de son papa, hésitant entre l’agacement d’un entraîneur adverse et la simple joie d’un père.
Les bleus sont amorphes, ils sont menés 0-7 et la révolte tarde à venir.
C’est la mêlée qui va réunir tout le monde, Bayonne va prendre le dessus sur sa rivale, Tatafu sort le jeune Parrou de sa trajectoire, il n’y reviendra jamais…
Maqala va trouver un intérieur impatient, les pick and go vont s’enchaîner, la conservation est bonne et Iturria, capitaine de combat, dans un dernier rush, marque le premier essai des bleus et blancs (7-7).

Mais nos Bayonnais sont trop sanctionnés, une mauvaise habitude dont il faudra se débarrasser pour les échéances futures.
La touche bayonnaise commence son fric-frac du contre en touche et vole les quelques munitions paloises.
La paire Tuilagi-Maqala verrouille le centre du terrain, pas besoin de traduire « no pasaran » en Béarnais, les Palois ont compris.
Nos fautes nous rattrapent toujours et Desperes passe sa première pénalité de l’après-midi (7-10).
Bayonne a le momentum, si cher à Piqueronnies, mais Pau s’accroche aux branches et résiste intelligemment.
Grandidier s’échappe et oublie peut-être Hewat à son extérieur.
Le momentum bleu reprend sa mainmise, sur une touche aux 22 m palois; Choueznoux s’élève plus haut que tout le monde, Bosch est au relais et trouve Tuilagi lancé comme l’extra-ball d’un flipper démoniaque.
Deux plaquages cassés et trois Palois accrochés à son maillot, le centre anglo-bayonnais marque son premier essai sous ses nouvelles couleurs, Segonds transforme (14-10).
Alors Pau tente des relances de loin, mais des en-avants malencontreux viennent réduire ses efforts à néant.
Segonds passe une pénalité (17-10).
Les bleus ratent peut-être le coche en toute fin de ce premier acte quand leur mêlée, largement dominatrice, n’arrive pas à conclure sa supériorité et se fait finalement sanctionner.
De la même façon, dans les arrêts de jeu de cette première mi-temps, Manu gâchera une belle occasion de contre en tapant trop vite en touche, au grand désespoir d’un Attissogbe qui attendait l’offrande en bout d’aile.
Le second acte reprend, Robson distille toujours des coups de pied parfaitement sentis qui mettent systématiquement en difficulté l’arrière-garde bleue, les obligeant à commettre des fautes.
Et comme Desperes semble parfaitement réglé, Pau revient tranquille au score (17-16).
La pluie tombe de plus en plus fort, Pau monopolise le ballon dans le camp bleu mais sans réellement mettre en danger la défense Bayonnaise.
Les groupés pénétrants verts sont, à chaque fois, démontés par des basques plus costauds et plus denses à l’impact.
La pluie mouille crie Monsieur de La Palice, les ballons glissent lui répondent des joueurs ennuyés par ce déluge avrilesque.
Bayonne domine toujours en mêlée, le match est haché, sans rythme et cela semble parfaitement satisfaire des Palois opportunistes.
Spring décide de faire un festin avec les ballons de rapines qui lui échoient, initiant un temps fort pour les siens.
Pénaltouche pour les riverains de la Nive, lancer Martin aux 5m palois.
Le groupé-pénétrant s’ébroue, premier arrêt annoncé par l’arbitre, Germain ouvre sur Maqala, les avants enchaînent après lui, Bruni, dernier servi, emporte tout et marque le 3ème essai des bayonnais, transformation de Lopez (24-16).
Mais comme une mauvaise habitude qui colle à la peau, une nouvelle faute bayonnaise va permettre au buteur Palois de passer la pénalité du retour (24-19).
On verra un beau débordement de Spring, une chandelle de Tiberghien, un en-avant d’Attissogbe, repris devant et 3 points de mieux pour Lopez (27-19).
Les 10 dernières minutes vont tomber dans l’à peu près, beaucoup de fautes de mains, d’erreurs techniques, de pénalités de part et d’autres qui deviennent les points de suspension d’un match qui se traîne en langueur pluvieuse.
Desperes va avoir une première occasion – juste avant le coup de sifflet final- de réduire le score et de permettre à son équipe d’obtenir le bonus défensif, ratée !!
Mais ce n’était que partie remise, le buteur palois, va bénéficier de la grande mansuétude bayonnaise pour avoir une nouvelle chance et arracher la petite queue de Mickey qu’ils étaient venus chercher (27-22).
Sur cette dernière pénalité, Adrien Marbot, impeccable de bout en bout, va siffler la fin du match.
Pau se satisfait de son accessit comptable et Bayonne engrange quatre nouveaux points, le portant à une victoire bonifiée de son poursuivant direct, Castres, qui pourrait être l’équipe adverse du futur barrage tant espéré et tellement attendu.
Le résultat est conforme à la physionomie du match, Bayonne a dominé les phases de conquête, a plus et mieux occupé le terrain et surtout a eu plus d’occasions d’essais. Il en a concrétisé trois alors que Pau n’a eu qu’une seule et unique occasion d’essai.
Les fautes bayonnaises et la fiabilité de Desperes ont permis aux béarnais de rester dans le match et de toujours espérer grappiller au minimum un point, qu’ils ont réussi à prendre au bout du compte.
Il reste quatre matchs, dont un déplacement à Castres, beaucoup tirent déjà de nombreux plans sur une comète inconnue, laissons-la faire sa révolution tranquillement, on aura le temps d’y revenir d’ici début juin.
Rien ne presse, savourons chaque jour qui passe et apprécions le fait de ne pas craindre une fin de saison mais plutôt d’en caresser toutes les promesses.
Le week-end prochain c’est repos avant de reprendre le marathon du championnat du côté de La Défense Arena et son terrain synthétique.
A très bientôt pour de nouvelles aventures…
Texte : Pierre Navarron