Un petit point...
Un stade entier qui ose enfin respirer, des joueurs dont les visages reflètent un grand ouf de soulagement, un entraineur qui craque et pleure sur son banc de torture, un « Sweet Caroline » aux airs maritimes résonnant dans les enceintes des travées du stade, la peur s’estompe dans une odeur de pluie.
La Rochelle a gagné, Bayonne ne pouvait pas être la dixième équipe d’affilée à battre des charentais tremblants.
On avait sorti tout ce qu’il y avait de mieux en magasin, tous les internationaux en titre étaient sur le pré, les tanks, les bulldozers, les Massey Ferguson. Tous avaient les moteurs révisés de près.
Pour un point, un seul petit point, La Rochelle a retrouvé le sourire et la joie de boire une bière joyeuse à la fin de match qui aurait pu tellement lui échapper.
Sous une interminable pluie d’avril, Bayonne a pris les commandes du match, rapidement, voulant instiller le venin du doute dans une équipe Rochelaise à la confiance effritée.
Le contrepoison est arrivé trop vite, au bénéfice d’un ballon contré et d’un dégagement direct en touche alors qu’il aurait dû trouver le rebond salvateur.
L’arme de dissuasion massive du pack Rochelais était déjà là ; la pénaltouche et son groupé pénétrant des familles, Jégou n’avait plus qu’à aplatir l’essai, qu’Hastoy a transformé (7-3).
La Rochelle va pousser, on va résister, plus ou moins bien, en n’encaissant pas de nouvel essai mais en commettant des fautes, que les pénalités transformeront en point (13-3).

Skelton éventre tous les points de rencontre, debout ou au sol, Atonio met notre mêlée dans l’embarras, l’agressivité rochelaise nous oblige à parer au plus pressé, nous voilà sanctionné à de nombreuses reprises par l’arbitre.
On vit de ballons de raccroc, qu’on tape loin devant pour éloigner un danger trop présent.
Mais de cette rapapille va naître notre premier essai, un billard à 3 bandes, initié de loin par Lopez et joué au près par Leyds voulant rattraper le ballon aérien par le capitaine Bayonnais, gêné par Carreras, il relâche le ballon que Teddy Thomas tente de dégager au loin, par le pied comme un footeux, direct dans les bras de Martocq, ravi de l’aubaine et jongleur à ses heures qui tombe dans l’en-but avec le ballon serré contre sa poitrine.
L’essai ne sera pas transformé et Bayonne recolle au score, stupeurs et tremblements dans les tribunes de Deflandre (13-8).
La défense bleue ne lâche rien, on fait tomber du Rochelais comme à Gravelotte.
Aldritt qui discute avec l’arbitre à chacune de ses décisions, demande une faute cynique, que ne lui accorde pas M. Gasnier.
Sur l’action suivante, c’est Camille Lopez qui est sanctionné pour ce motif, carton jaune et pénalité justifiée, Hastoy enquille encore (16-8).
Pourtant Skelton est prévenu 10 fois par l’arbitre qu’il est à la faute, mais il ne sera jamais sanctionné, Teddy Thomas fait une escorte devant GHK, ce dernier s’agace et balance le Rochelais et c’est le Bayonnais qui sera pénalisé.
Ce sont les péripéties d’un match, mais tu apprécies qu’elles se répartissent dans les deux camps. Pour oublier ça, Mitiou boit un Lagavulin, même deux, on ne sait jamais…
Notre contre en touche est une perfection, il gâche nombre de munitions jaunes et noires à leur grand desespoir.
La mi-temps va être sifflée mais Bayonne hérite, avant de rentrer au vestiaire, d’une pénalité, Tiberghien prend le but, il n’est pas récompensé, ça passe à côté.
Dès la reprise Tatafu marque un essai, en force, après la pénaltouche de service, la pluie est de plus froide pour tous les rochelais.
Cheikh transforme (16-15).
Sur le coup de pied de renvoi, Paulos est pris à la faute, Hastoy étonnamment régulier en ce Samedi-Saint, passe la pénalité.
Tatafu sort sur blessure, ça pue l’hécatombe du côté des piliers.

On oublie quelques soutiens offensifs et on recule de 60m, pas grave, la touche rattrape tout.
Kerr-Barlow semble avoir oublié que sur une mêlée, le 9 ne peut plus suivre la progression du ballon, pas grave, l’arbitre l’a oublié également.
Dulin prend un jaune pour une faute Carreras, Cheikh passe la pénalité (19-18).
On est en difficulté sur tous les ballons aériens, heureusement notre solidarité défensive fait le job et permet de repousser les Rochelais chez eux.
53ème minute, c’est l’heure du bijou de l’après-midi et il est bayonnais !!
Passe à rebond de Germain pour Segonds, petit coup-de-pied par-dessus de Joris, Cheikh récupère et retrouve, plein axe, GHK libre de tout défenseur. Course rectiligne du 8 bayonnais pour aller aplatir le ballon après une apothéose en ventriglisse qui fige Deflandre, Segonds transforme et Bayonne prend les commandes (19-25).
Malheureusement, sur le renvoi on se met à la faute et Hastoy, déguisé en vengeur démasqué, passe une nouvelle pénalité .
Chouzenoux est le croquetouche de tous les cauchemars du talon rochelais, il happe tous les cuirs qui passent à sa portée.
Tuilagi est sanctionné pour un plaquage à l’épaule, il échappe au jaune par miracle, le banc Rochelais éructe.
Il reste moins d’un quart d’heure à jouer, Bosch prend un jaune après une longue séquence défensive où tous les gros porteurs maritimes ont tenté de renverser la herse défensive bayonnaise, sans jamais y parvenir.
Avec un joueur de moins en défense c’est plus facile, Aldritt perce le coffre-fort bleu et blanc, Hastoy est à 100 % (29-25).
Le stade est en apnée, Bayonne ne veut pas s’avouer vaincu et challenge le double champion d’Europe.
Aldritt se rate sur la réception du renvoi, touche pour Bayonne à 5M de la ligne d’en-but rochelaise. Faute de talon, Giudicelli est sorti blessé à la mi-temps, c’est Germain qui s’y colle.
Et l’impro à ce niveau, c’est rarement une réussite.
On ne trouve pas le sauteur et sûrement la balle de match.
Segonds rate une pénalité, un peu plus tard Tiberghien en passe une autre (29-28).
Il reste moins d’une minute à jouer, les bleus ont la possession, une touche qui n’avance pas trop, on lance Tuilagi au milieu du terrain, mais le contest Rochelais est le plus prompt et arrache le ballon, game over, Deflandre explose dans un ouf qui a dû retentir jusqu’au vieux port.
La défaite est là, le point de bonus défensif aussi qui nous permet de conserver la 4ème place devant Castres.
C’est compliqué de gagner, surtout à l’extérieur, quand tu as 16 pénalités contre toi, alors que ton adversaire en a moitié moins et que ton taux d’efficacité au pied est à 62 %, pourtant tu meurs à un point…
Je vous laisserai en tirer les conclusions que vous voulez.
Tout sera serré, jusqu’au bout, à commencer par le week-end prochain à Anoeta où les Palois ne viendront pas en victimes expiatoires, comme nous ce samedi à La Rochelle.
C’est un match qui sent la passion, la suprématie départementale (ça donne pas un titre, ça ??) et le souvenir d’une cuisante défaite au match aller.
Certains stades sont les fabriques des rêves des équipes, faisons d’Anoeta Stadium gure ametsen tranpolioa (El trampolin de nuestros sueños)…
À bientôt
Texte : Pierre Navarron